Sixième Sens

Fiche du film

Titre original : The Sixth Sense
Réalisation : M. Night Shyamalan
Scénario : M. Night Shyamalan
Musique : James Newton Howard
Acteurs principaux :
Bruce Willis
Haley Joel Osment
Olivia Williams
Toni Collette
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller
Durée : 107 minutes
Année : 1999

 

 

Critique :

Sixième sens de M Night Shyamalan n’a pas gagné en postérité pour rien. Tout d’abord, le film est reconnu pour ses qualités dans le genre fantastique. M Night Shyamalan réunit des éléments paranormaux qui intriguent le spectateur et l’amènent à se creuser la tête pour comprendre ce que ces étranges phénomènes signifient. L’on frissonne juste ce qu’il faut car Shyamalan ne s’entoure pas de scènes horrifiques superflues. En fait, la peur que le spectateur peut ressentir tout au long du film est davantage suscitée par l’inconnu (la mort) et ce que l’on ne comprend pas que par des scènes dites d’horreur. Le film est également connu et reconnu pour son twist final qui en a surpris plus d’un. Le réalisateur a pris soin de truffer son film d’indices afin de ne pas laisser le spectateur dans le flou total jusqu’à la révélation finale. Ainsi, il y a un échange permanent entre le film et le spectateur. Et c’est peut être pour cela que le thème de la mort nous touche tous.
Mais M Night Shyamalan réussit aussi à nous toucher en créant des personnages simples, évoluant dans des milieux simples et banals. Les personnages sont divorcés ou heureux en mariage, exercent des boulots communs et vivent avec leurs joies, leurs peines et surtout leurs peurs.
Le réalisateur tient en haleine le spectateur comme l’ont fait les plus grands films du genre
(Hitchcock avec Sueurs froides ou encore Kubrick avec Shining) auxquels il fait référence dans ce film. Suspense et atmosphère glaciale bercent le film dans un rythme particulier qui ne se permet de se relâcher la moindre seconde. La musique signée James Newton Howard porte parfaitement l’ambiance mystère et parfois angoissante de l’œuvre.
Le réalisateur d’origine indienne offre des rôles forts à ses acteurs. Bruce Willis déjà connu pour ses films d’action notamment est parfaitement crédible. Ce rôle lui permet de dévoiler au public une facette plus intime et plus sobre de son jeu. Toni Collette, reconnue par la profession mais moins connue par le grand public signe une belle performance en mère de famille. Mais la révélation du film est le jeune acteur Haley Joel Osment. Le jeune acteur apporte grâce à son jeu fabuleux, une grande part de mystère au film.
Le réalisateur témoigne d’une approche très psychologique de la mort et parvient même à détacher le spectateur de ses peurs en rapport avec ce monde inévitable et inconnu.

Mon analyse :

Un film fantastique

Le film de M Night Shyamalan s’inscrit dans la lignée du fantastique classique . En effet, dans le fantastique, l’on confronte le monde réel à des phénomènes incompatibles avec les lois naturelles. Ainsi, le psychologue Malcolm Crowe et sa rationalité sont confrontés aux visions du jeune Cole Sear. Sixième sens, s’inscrit dans la même lignée que des films comme Rosemary’s baby de Roman Polanski qui a ouvert la porte au nouveau genre fantastique américain. Ainsi, l’univers des personnages est banal et les actions étranges se déroulent dans leur quotidien. Mais Sixième Sens joue aussi avec le fantastique psychologique et s’incrit de cette manière dans ce que l’on pourrait qualifier de gothique américain. En effet, le gothique américain se différencie du gothique européen par le simple fait que l’horreur, l’angoisse viennent de l’esprit.

Les morts

L’on peut remarquer trois temps dans le film quant à l’apparition des morts à l’écran. Tout d’abord, les morts sont désignés par des signes et le spectateur ne peut les identifier que par le biais d’indices : un faisceau lumineux autour de Cole, les portes du placards qui s’ouvrent seules, la présence du froid …. Puis, Cole révèle son secret et les choses prennent une autre tournure. M Night Shyamalan décide de rentrer dans la tête du jeune Cole et de montrer ce qui l’effraie tant . Les morts apparaissent de manière rapide, portés par de la musique plus ou moins angoissante. Le réalisateur montre ce qui effraie Cole chez ces morts : des poignets entaillés, un trou dans la tête causée par une arme à feu, des pendus en plein milieu du couloir, la petite fille qui vomit … Enfin, les personnages comprennent ce que veulent tous ces morts : être en paix. Et là , la vision de Cole quant aux morts change . Leur apparition à l’écran ne font plus peur, la musique qui les porte est bien moins angoissante. Cole comprend que grâce à son don, il peut aider à faire lumière sur des morts parfois obscures (Kyra, la petite fille empoisonnée par sa mère).

La mort

Pourquoi sommes nous attirés par les films de fantômes ? Pour frissonner ? Il y a à la une partie de la réponse c’est certain. Mais surtout, les fantômes comblent une partie de notre peur d’affronter la mort. En effet, si les fantômes existent bel et bien alors nous ne mourrons jamais vraiment. Et au final, cela est rassurant.

Le twist

Le réalisateur utilise ce procédé qui consiste en fait à bouleverser l’idée que le spectateur a pu se faire tout au long du film. Il monte ainsi volontairement des fausses pistes et soigne les détails afin que rien ne puisse paraître étrange et mette le spectateur sur une piste trop facilement. Anna Crowe, l’épouse du psychologue est une des meilleures fausses pistes que Shyamalan ait pu intégrer dans son film. En effet, elle est censée reprocher à son mari son absence et le bouder pour cette raison. C’est ce que croit son mari et le spectateur lors de la scène au restaurant par exemple. Or, l’on remarque certains petits détails qui peuvent nous mettre sur la piste : peu avant que Malcolm se fasse tirer dessus par un de ses anciens patients, sa femme était la première à être fière que son mari l’ait quasiment sacrifié pour son travail. Au restaurant enfin, l’on remarque qu’il n’y a qu’une assiette sur la table et que la chaise sur laquelle se pose Malcolm n’est pas censée être là et qu’il ne la bouge pas lorsqu’il s’assoit. Ainsi, les personnes présentes dans le restaurant ne voit pas une chaise bouger seule. L’on remarque aussi que tous les contacts avec les autres personnages sont toujours suggérés et jamais montrés. Ainsi, l’on voit une scène s’ouvrir sur Malcolm et la mère de Cole, comme s’ils avaient discuté. Or, lorsque le plan s’ouvre, ils sont seulement assis l’un en face de l’autre. C’est la même chose lorsque Cole et sa mère se retrouve chez le médecin incarné par le réalisateur lui-même. D’ailleurs, pour précision, M Night Shyamalan voulait interpréter ce rôle pour que ses parents médecins, puissent le voir une fois vêtu comme un médecin. Seulement, les personnages semblent regarder Malcolm, qui est en fait invisible à leurs yeux. Pourquoi ? Soit ils regardent dans sa direction sans le voir, soit ils sentent une présence et leur regard se tourne vers l’endroit où Malcolm se tient. Puis à la fin, soudain, la vérité frappe Malcolm en plein face . Il est bel et bien mort. On apprend la vérité par une succession très rapide de flash-backs .Ce type de scène ressemble à certaines de Psychose d’Hitchcock, ou encore celle d’Usual Suspects de Brian Singer.

L’Amérique de Manoj

Une nouvelle fois, le réalisateur d’origine indienne tourne à Philadelphie, sa ville. Cependant, à travers certains élements présents dans le film, l’on se rend compte qu’il dépeint une certaine critique de l’Amérique . Tout d’abord, le personnage de Malcolm Crowe est très partagé. Sa carrière est brillante, il a même reçu une distinction pour cela. Mais il gère mal son couple et sa femme a tendance à se sentir délaissée. Est ce une manière pour le réalisateur de montrer que le succès a un prix ? Et que parfois le prix est trop élevé ? Que la famille et que l’entourage ne doivent jamais être négligés en aucun cas ? Il est tellement préoccupé par le cas de Cole qu’il n’a même pas le temps de se rendre compte qu’il est mort. Sa mort lui sert en quelque sorte à faire le point sur sa vie déjà derrière lui. Les habitants de Philadelphie sont toujours organisés et en rang. C’est ce que l’on voit dans de très nombreuses petites scènes : les élèves qui traversent la rue pour aller faire du base-ball, la salle de classe, les voitures qui attendent sagement dans les bouchons, les parents qui filment tous en même temps… La vérité semble poser problème en Amérique. Ainsi, l’on se réfugie dans les églises comme Cole et ses soldats, l’histoire américaine est idéalisée alors que des personnes ont été pendues pour un oui ou pour un non, une publicité pour un sirop pour la toux semble montrer ce qu’attend l’Amérique de ses citoyens, une mère a empoisonné sa propre fille et peut être même d’autres personnes et personne ne semble au courant, le drapeau américain trônant sur le toit de l’école de Cole semble écraser le petit garçon… La société est pleine de préjugés et ne peut donc pas comprends l’irrationnel . Ainsi, la mère de Cole est accusée de maltraitance, Cole est perçu comme fou.

Le rythme

Chez M Night Shyamalan, le rythme du métrage a beaucoup d’importance. Ici, l’on remarque que son montage est assez lent et qu’il utilise avec affection les longs fondus noirs . Ce procèdé permet de montrer comment avancent les personnages : ils sont dans l’incompréhension.

Une ambiance froide.

Tout d’abord, elle est suggérée par la présence des morts qui sont censés être indiqués par la présence du froid. Tak Fujimoto, utilise les surcadrages ce qui permet de dégager une ambiance assez sobre. Les couleurs en général ne sont pas très vives. On se croirait sans arrêt en plein automne .

La signification des couleurs

Trois couleurs se détachent : le rouge, le vert et le noir. Le noir est là pour indiquer les ténèbres, la présence des morts et dégager une ambiance plutôt angoissante. Le rouge se retrouve sur le pull de Cole, sur la porte de l’église, sur la tente de Cole, sur la poignée de porte de la cave de Malcolm. Il représente la peur, et le danger. Le vert qui se manifeste par la nature notamment évoque l’espoir et la vie mais cette couleur est bien moins présente que le rouge. Le rouge est la couleur que porte la veuve noir qui a tué sa propre fille alors que tous les autres invités endeuillés portent du noir. Enfin, une autre couleur peut se détacher : il s’agit du bleu. C’est la couleur que porte notamment la petite fille qui a été tuée. Elle peut signifier la connaissance et la paix. Le vert et le rouge ne cessent pas de s’entremêler comme dans ce jeu pour enfants posé sur la table du médecin. Elles représentent le combat permanent entre la vie et la mort.

Clins d’œil au cinéma

M Night Shyamalan a sans doute une certaine passion à insérer des éléments qui rappellent de grands classiques du cinéma. Ainsi, l’escalier en colimaçon évoque Sueurs Froides d’Hitchcock, une apparition caméo rappelle aussi ce réalisateur de génie. L’enfant a le sixième sens comme le petit Danny a le shining dans The Shining de Kubrick. Une scène montre des tiroirs de la cuisine qui s’ouvrent seuls. Ce n’est pas sans rappeler Poltergeist de Tobe Hooper. Le petit garçon se prénomme Cole. C’est aussi le nom de famille de James Cole dans l’Armée des Douze singes. Ils ont d’autres similarités que leurs noms : ils voient des morts et sont incompris et donc pris pour des fous.

L’enfance

M Night Shyamalan a déjà répété que l’enfance l’intéressait. C’est sans doute pour cela qu’il réalisera plus tard La jeune fille de l’eau, tiré de son propre conte pour enfants du même nom. L’enfance apparaît ici en cauchemar. Seuls les enfants qui font du mal ont l’air heureux. On voit à plusieurs reprises les enfants jouer dans une pièce comme si l’irréel leur servait d’échappatoire. Les morts ne sont évidemment pas que des enfants et pourtant l’on en voit au moins deux à l’écran : le jeune garçon qui s’est pris une balle dans la tête, et la petite fille qui a été empoisonnée. Comme si l’enfance malmenait les enfants. Cole explique un moment à Malcolm que l’école a  » fait une réunion » parce que ses dessins ne représentaient pas de jolies choses. Les enfants sont sans cesse formatés et leur univers propre a du mal à être accepté.

Erin

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