The Box

Réalisation : Richard Kelly
Scénario : Richard Kelly
Acteurs principaux :
Cameron Diaz
James Marsden
Pays : Etats-Unis
Genre : Thriller
Durée : 115 minutes
Année : 2009

 

Critique analytique :

The Box qui apparaît d’abord comme un simple thriller, se révèle être un film métaphorique sur la mise à l’épreuve divine. La question du choix a un rôle central et n’est pas sans rappeler la philosophie existentialiste de Jean-Paul Sartre, qui est d’ailleurs cité dans le film.

En effet, Sartre considère que l’homme est condamné à être libre. Il doit donc faire des choix pour avancer. Et même choisir de ne pas choisir est un choix. C’est ce que le réalisateur Richard Kelly s’efforce de montrer dans son film. Les personnages sont constamment amenés à faire des choix plus ou moins faciles.

Norma croit immédiatement au pouvoir de la boîte, parce qu’elle veut y croire. Elle veut croire qu’en appuyant sur ce bouton, un million de dollars lui sera accordé. Il est clairement exposé que cette famille vit au dessus de ses moyens et qu’elle a besoin d’argent. Bref, pourquoi vivre au dessus de ses moyens ? Dans la majorité des cas, les personnes vivant au dessus de leurs moyens sont des personnes qui veulent afficher à leur entourage et à leur voisinage leur réussite économique et sociale. Bref, cet argent littéralement tombé du ciel permettrait à cette famille de mieux se positionner sur le plan social. Même si cela n’est pas clairement exposé, on a l’impression que Norma veut briller en société. Elle a donc besoin de se positionner par rapport aux autres. Et c’est justement la question des autres qui va nous intéresser.

« Pas besoin de grill, l’Enfer, c’est les autres « . C’est cette phrase de Jean-Paul Sartre qui est citée dans le film. Que signifie-t-elle ? Sartre pensait que les autres sont ce qu’il y a de plus important en nous-mêmes. Le jugement d’autrui intervient nécessairement lorsque nous essayons de nous connaître. Pour Sartre, dépendre d’autrui c’est être en enfer. Norma est donc symboliquement en enfer car elle se préoccupe beaucoup du jugement d’autrui.

Cette idée va être renforcée par la suite des évènements. C’est Norma et elle seule qui va appuyer sur le bouton.

Arlington Steward avait pourtant bien exposé les conditions. Si Norma ou son mari appuient sur le bouton, quelqu’un qu’ils ne connaissent pas va mourir. Lors de la seconde visite de Mr Steward, Norma et Arthur sont particulièrement inquiets. Ils comprennent que l’énoncé de Arlington Steward est flou et inquiétant. Qui est donc cet inconnu ? Peut-il être un voisin ? Après tout, nous ne pouvons jamais réellement connaître nos voisins. Arthur se demande même si cet inconnu ne peut pas être lui-même. C’est là qu’intervient un court dialogue intéressant. Norma affirme à son mari qu’elle le connait mieux que personne, mieux que lui-même. Elle affirme la même chose concernant leur fils. Mais elle ne parle pas d’elle-même. Il devient alors évident que Norma ne se connait pas et qu’elle est en fait la personne inconnue qui va mourir.

La théorie d’Aristote peut nous éclairer sur cette idée qu’il est difficile de se connaître, et que cela n’est possible que par le biais du regard d’un ami.

Apprendre à se connaître est très difficile (…) et un très grand plaisir en même temps (quel plaisir de se connaître!); mais nous ne pouvons pas nous contempler nous-mêmes à partir de nous-mêmes: ce qui le prouve, ce sont les reproches que nous adressons à d’autres, sans nous rendre compte que nous commettons les mêmes erreurs, aveuglés que nous sommes, pour beaucoup d’entre nous, par l’indulgence et la passion qui nous empêchent de juger correctement. Par conséquent, à la façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons voir notre visage, quand nous voulons apprendre à nous connaître, c’est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir, puisqu’un ami est un autre soi-même. Concluons: la connaissance de soi est un plaisir qui n’est pas possible sans la présence de quelqu’un d’autre qui soit notre ami; l’homme qui se suffit à soi-même aurait donc besoin d’amitié pour apprendre à se connaître soi-même.

Il est facile de remarquer que la plupart des personnes appuyant sur le bouton sont des femmes. Qu’est ce que cela signifie ?

D’après la théorie que nous avons déjà avancé, c’est à dire selon laquelle les personnes qui appuient sur le bouton sont en fait des personnes qui ne se connaissent pas elles-mêmes, et qui ne pensaient pas pouvoir tuer un innocent par cupidité. Les femmes ont-elles plus de difficulté à se connaître ? C’est une possibilité.

Cela souligne aussi la différence entre la moralité que nous prônons et nos actes au quotidien. Sans juger Norma, et son mode de vie, l’on remarque certains changements décisifs dans la vie de cette famille : la réduction dont Norma bénéficie pour payer la scolarité de son fils est retirée et Arthur n’obtient pas sa promotion d’astronaute. De plus, ce couple vit au dessus de ses moyens; ils ont une corvette par exemple et Norma, qui souffre d’un handicap au pied, a prévu une opération.

Le spectateur est alors amené à s’interroger. Aurai-je appuyé sur le bouton pour obtenir un million de dollars ? Aurai-je appuyé sur le bouton par curiosité ?

Pourquoi donc Norma à appuyer sur ce bouton ? Par cupidité ? Par curiosité ?

La question de la croyance a une place importante dans le film. Et elle peut nous permettre d’apporter quelques réponses aux questions ci dessus.

Norma apparaît comme une personne très attachée à la matérialité. Elle pense avant tout aux problèmes financiers auxquels la famille sera tôt ou tard confrontée.

Arthur démonte la boîte pour voir si la proposition de Arlington Steward est sérieuse ou non. Il s’avère qu’il n’y a rien dans la boîte. Arthur pense donc que tout cela n’est pas sérieux. Et pourtant, il ne va pas appuyer sur le bouton.

La principale différence entre Arthur et Norma, c’est leur position vis à vis de la croyance. Norma est attachée au matérialisme. Arthur, notamment par la biais de son métier, s’intéresse à la question extraterrestre voire à la question de la vie après la mort.

Ainsi, Arthur par ses croyances, a foi en la vie et peut être même en la mort. Norma, on le voit, appuie sur le bouton, dans un moment de faiblesse et de doute. Elle n’a pas foi en la vie et les jours difficiles en perspective la minent.

Arthur va lui aussi être confronté à un choix même s’il n’a pas échoué au test. Il va devoir choisir entre tuer son épouse pour sauver son fils d’une vie privée de lumière et de son ou sauver sa femme et vivre avec un enfant aveugle et sourd. Arthur va choisir de sauver son fils et de sacrifier sa femme qui croule sous la culpabilité d’avoir appuyé sur le bouton. Mais Arthur ne pense pas qu’un troisième choix est possible. Pourquoi ne pas avoir retourné l’arme contre lui ? Pourquoi ne pas avoir supprimé toute sa famille, lui y compris ? Si cette idée n’est même pas venue à l’esprit d’Arthur, c’est sans doute parce qu’au fond il n’est pas sûr de ce qu’il y a après la mort.

L’on apprend dès le début du film qu’Arlington Steward a été frappé par la foudre et qu’il est mort. Il a donc ressuscité. Il est devenu l’intermédiaire privilégié avec « ceux qui contrôlent la foudre ». Mais qui sont-ils ? Sont-ils des dieux ? Sont-ils des extraterrestres ?

Le film penche pour la thèse extraterrestre notamment grâce à la présence de la NASA, du projet sur Mars, de la passion d’Arthur pour la science-fiction et l’astronomie. Des idées récurrentes vis à vis des extraterrestres apparaissent dans le film : ils peuvent contrôler les personnes et ils semblent dépourvus de sentiments. En fait, et c’est seulement un avis, mais il est possible que la série Disparition produite par Steven Spielberg ait pu avoir une quelconque influence sur le film. En effet, l’on remarque que les personnes peuvent être contrôlées physiquement, et que les extraterrestres sont dépourvus de sentiments. C’est même en cela que réside leur projet.

Arlington Steward est touché par ce que va lui dire Norma. Norma affirme qu’elle a immédiatement aimé Arlington Steward. Elle souffre elle-même d’un handicap peu visible. Elle comprend aisément à quel point cela doit être difficile de porter une telle marque sur le visage.

Pourquoi avoir choisi une boîte ? Il semblerait que la boîte puisse avoir plusieurs significations.

Il est clairement exposé que la boîte représente assez bien la vie humaine. Il est dit dans le film que nous vivons dans une maison en forme de boîte, que nous nous détendons devant la télévision en forme de boîte et etc …

Métaphoriquement, la boîte c’est peut être aussi la boîte de Pandore. Dans la mythologie grecque, Pandore est la première femme. Elle est associée à la « boîte de Pandore ». Pour résumer l’histoire de Pandore, la jeune femme épousa Épiméthée qui promit à son frère Prométhée de refuser les cadeaux de la part de Zeus. Or, il accepta celui de Pandore. Ce cadeau était une boîte contenant tous les maux du monde. Curieuse, Pandore ouvrit la boîte.

Comme nous l’avons dit, ce sont en majorité des femmes qui appuient sur le bouton. Norma est une allégorie d’Ève. Toutes les deux sont averties et toutes les deux ont cédé à la tentation. En effet, Norma avait été prévenue des conséquences de son acte : quelqu’un qu’elle ne connait pas mourra. Ève avait été avertie de ne pas croquer dans la pomme.

Norma et Ève en cédant à la tentation ou à la curiosité, plongent l’humanité dans une vie de maux et de douleurs. Ainsi Adam et Ève sont chassés du paradis. Non seulement, l’homme va devoir changer de mode de vie (travailler par exemple) mais la femme sera punie par le fait « d’enfanter dans la douleur ».

Deux interprétations sont alors possibles. Soit la femme est la source de tous les problèmes, soit la femme a permis à l’homme de s’améliorer dans l’adversité.

L’aspect religieux du film semble crédible, d’autant plus que les évènements se déroulent durant la période de Noël.

L’on peut voir dans le film une critique sur le conditionnement des êtres humains.

Il est répété à de très nombreuses reprises le terme « employés »; qui nous fait penser au travail et à la vie de certains êtres humains, qui doivent obéir au doigt et à l’œil ou qui doivent répéter inlassablement les mêmes gestes. The Box n’est donc pas dénué d’humanité. Bien au contraire, ce film révèle avoir un fond social notamment par le biais d’une critique acerbe du matérialisme.

Le rôle de Norma permet à Cameron Diaz de révéler son talent d’actrice, qui a parfois été oublié. Elle est poignante en Norma, cette épouse et mère aimante, qui va jusqu’à accepter son sort pour sauver son fils et un semblant de famille.

Frank Langella est aussi imposant que terrifiant en Arlington Steward. A chaque apparition, il nous glace le sang. Sa sensibilité inexistante est à la fois frappante et effrayante.

Les autres acteurs sont plus effacés mais efficaces.

L’on notera une mise en scène particulièrement soignée, où chaque détail et chaque symbole ont leur importance. La reconstitution des décors et de l’atmosphère des années 1970 est soignée et efficace.

Malgré l’aspect surnaturel du film, le réalisateur signe au final un film très sobre. En effet, Richard Kelly se concentre d’abord sur l’aspect humain.

La force du film réside aussi dans son scénario. Lorsque Norma appuie sur le bouton, le flou s’installe peu à peu notamment grâce à l’introduction de l’histoire d’une femme assassinée. Cette femme était-elle l’inconnue? Norma a-t-elle assassinée cette femme ? Est ce un homicide sans rapport ? L’on sent bien que ces deux histoires ont un lien car le mari de la femme assassinée travaille à la NASA.

Le réalisateur cherche à brouiller les pistes, à multiplier les réponses possibles et les explications. Bref, The Box est un film stimulant et intelligent, porté par une mise en scène impeccable.

Erin

Critique :

Je n’ai jamais vu Donnie Darko, ni Southland Tales, les précédents films de Richard Kelly mais après avoir vu The Box, j’ai très envie de les découvrir. Je ne comprends franchement pas les mauvaises notes des spectateurs, et de la presse sur Allocine ou Imdb. On peut parfois se sentir déconcerter par The Box mais quel OFNI ! On n’en voit pas des tonnes des films comme celui-là . Sans vouloir dévoiler les intrigues, ce film mélange brillamment thriller et science-fiction, c’est intelligent, complexe (plus qu’on ne le croit), bourré de références bibliques et littéraires, pose beaucoup de questions.

Depuis quelques temps, Cameron Diaz me surprend. Elle tient ici un de ses meilleurs rôles. James Marsden est aussi excellent et Frank Langella est inquiétant. Le scénario est très bon, et la mise en scène est impeccable et très bien maitrisée. Il y a aussi des moments très angoissants (il y a même une scène qui m’a fait crier tellement que j’ai sursauté) et d’autres émouvants ou envoûtants.

Tinalakiller

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